575-PASSERELLES AU-DESSUS DU CANAL ET DE L’AUTOROUTE

Gand, Belgique

(2010); (01-575). Concours restreint d’esquisses sur invitation.

Services réalisés :

– Urbanisme.
– Architecture.
– Stabilité(avec Arcadis Belgique).
– Paysage.
– Abords et voiries.

La question posée :

Les deux passerelles, destinées aux piétons et aux cyclistes, empruntent le site d’une ancienne voie ferrée désaffectée pour relier la ville de Gand à sa périphérie.  Elles franchissent successivement le canal (ou Ringvaart) et l’autoroute E40. Compte tenu de leur faible pente, chacune d’elles présente une longueur de 266 m.

Les critères suivants guident la conception des deux passerelles :

–       faibles surcharges d’exploitation (la structure peut dès lors être légère, à condition de  compenser cette légèreté par de la raideur) ;

–       déformation élastique limitée ;

–       prise au vent limitée ;

–       protection de l’usager contre le vent et la pluie ;

–       vue des usagers sur le paysage environnant ;

–       parois empêchant la chute d’objets ou de personnes ;

–       surfaces lisses sans arêtes vives ;

–       traitement antidérapant de la surface horizontale ;

–       évacuation rapide de  l’eau de pluie ;

–       intervention aisée des services de sûreté et de sécurité ;

–       montage économique et le moins perturbant possible pour l’environnement.

 

Le concept architectural :

La passerelle se présents sous la forme d’un tube en acier “transparent” à toiture étanche, de section constante, en tôle perforée raidie par des cadres extérieurs régulièrement répartis. Son profil en long est étudié pour limiter les pentes au minimum.

Plusieurs raisons conduisent à l’utilisation de tôles perforées :

–       elles présentent des surfaces lisses et continues ne demandant pas de mains courantes,

–       elles améliorent le confort des usagers en freinant la vitesse du vent,

–       elles assurent une protection contre la pluie grâce au film fluoré transparent collé à l’extérieur de la tôle de toiture,

–       enfin, le sol perforé évite toute stagnation d’eau ou de glace.

La section du pont présente un plancher et une toiture en segments cylindriques, dont la génératrice est en forme de chaînette. Cette disposition limite au strict minimum la quantité de matière nécessaire pour le plancher et garantit l’écoulement aisé de l’eau de pluie en toiture.

La perforation s’estompe sur les parois verticales au droit des raidisseurs, sur une largeur qui varie selon le diagramme enveloppe des moments fléchissants. Un raidisseur de 50 mm de hauteur suit  la même ligne, légèrement en retrait, et sert de support à l’éclairage artificiel.

L’encombrement du plancher se limite donc au strict minimum et autorise la pente longitudinale la plus douce possible pour le platelage de l’ouvrage (4 % en moyenne).

La section tubulaire permet en outre la reprise très aisée des efforts de torsion induits par la déformée en S du tracé en plan du pont au droit de la Oudespoorweg.

Pour éviter les risques d’accident, les appuis sont disposés à distance des voies rapides de circulation automobile, en particulier de part et d’autre du Ringvaart.  Ils présentent une forme de “V” pour permettre la réalisation des branchements perpendiculaires de part et d’autre du Ringvaart. Cette disposition impose de prévoir un cadre résistant aux efforts tranchants.

La passerelle est divisée en tronçons d’une longueur maximum de 68 m, assemblés par soudure en atelier et amenés par bateau.  Ils sont mis en place sur les appuis en “V” et soudés les uns aux autres au fur et à mesure, sans autre joint de dilatation qu’aux deux extrémités de chaque pont.

Les travées centrales sont lancées par balancement, tant au-dessus du Ringvaart, qu’au-dessus de l’autoroute. Les deux travées extrêmes du pont sur l’autoroute sont roulées à partir du côté Ringvaart sur les travées déjà mises en place.

Le principe structurel :

Les vertus du tube à parois membranaires, où les cadres raidisseurs font appel à la résistance postcritique (postbuckling strength), sont connus depuis les travaux de Lynn Beedle dès les années 1960 (Lehigh University, Pennsylvania).  Ce principe trouva très rapidement une application pour les remorques de poids lourds en caisson d’acier à haute résistance ou en aluminium.

Le projet de réaliser une passerelle piétonne en tôle perforée basée sur ce principe est dans la tête du concepteur depuis plusieurs décennies, mais elle s’était toujours heurtée jusqu’à présent à divers obstacles pratiques.

Ces 20 dernières années, certains aspects-clés des technologies de construction métallique ont connu un développement rapide et continu :

–       la disponibilité de tôles en acier de très haute résistance (en particulier grâce aux travaux scientifiques, industriels et technologiques de Sidmar),

–       l’amélioration constante des performances ainsi que la réduction du coût des soudures in situ et la parfaite maîtrise de leur contrôle de qualité,

–       la sophistication croissante de l’outillage industriel, en particulier la robotisation de la découpe et de l’assemblage chez les constructeurs métalliques,

–       finalement, le développement de nouveaux progiciels de calcul, en conjonction avec le développement des Eurocodes, permettant maintenant un calcul de très haute précision.

Ceci rend maintenant le concept du pont en tube membranaire réalisable, de manière particulièrement économique et efficiente.  A la connaissance du concepteur, la structure tubulaire proposée ici est une première mondiale.

Les extrémités du pont, ainsi que les quatre points d’appui intermédiaires, points de grande raideur dans la forme globale et sujets à grands déplacements, sont donc idéaux pour recevoir les éventuels amortisseurs tels qu’éventuellement requis par l’étude dynamique détaillée.

Une analyse morphologique en relation avec la reprise des efforts :

Les diagrammes-enveloppes des moments fléchissants montrent que, dans tous les cas de charge, les moments ne varient que de 40 % sur la longueur totale de l’ouvrage (à l’exception des appuis d’extrémité ou ils s’annulent). 

Il en va de même, mais dans une mesure légèrement moindre, pour les efforts tranchants qui ne varient que du simple au double, les valeurs élevées se situant dans les zones (près des appuis) où les efforts ne s’alternent pas et les valeurs basses précisément là où les efforts s’alternent (en travée).

Ces remarquables caractéristiques confirment le bien-fondé d’une section tubulaire de section constante, où la quantité de matière varie peu sur la longueur.  Elles montrent également tout l’intérêt des appuis en “V” qui réduisent fortement les pics de moments sur appuis.

Les opercules d’accès en toiture sont prévus aux endroits où les moments fléchissants sont les plus faibles, approximativement tous les 50 m. En effet, la partie centrale de la toiture n’intervient pas dans la résistance en flexion du pont, mais elle est en revanche essentielle pour la résistance en torsion et la raideur, ainsi que pour la stabilité dynamique.

L'intégration paysagère :

L’intégration paysagère pose la question de la forme et de l’élancement.

Réduire au strict minimum la hauteur de la structure, pour lui donner une minceur anorexique, est une approche trop régulièrement observée pour les passerelles piétonnes. Ces structures amincies à l’extrême se voient immanquablement alourdies par les garde-corps et autres dispositifs nécessaires à la sécurité et au confort.

C’est l’inverse qui est proposé ici, à savoir une structure ample, mais très transparente pour en limiter le poids au strict minimum et offrir aux usagers une traversée agréable. C’est cette transparence tout à fait réelle qui permet de légitimer la proposition dans le paysage : il s’agit plutôt d’une baudruche généreuse et légère, à la manière de Niki de Saint Phalle, que d’un lourd émincé de Giacometti.  

La présence de l’objet dans le paysage est franche mais discrète, sans surenchère formelle.  Au-dessus de l’autoroute, la passerelle, de hauteur constante, s’assimile visuellement aux portiques qui supportent les panneaux d’information aux usagers et elle peut d’ailleurs parfaitement être utilisée dans ce but.

L'implantation :

Le caractère structurant des passerelles dans le paysage impose qu’elles soient implantées dans l’axe de la drève boisée, la Leebeekstraat.  Le pont part donc du côté sud de la De Pintelaan, traverse en ligne droite le Ringvaart et l’autoroute, puis  présente une légère déformation en S à l’arrivée du côté de la Oudespoorweg.

Cette implantation permet le maintien de la plupart des arbres de la Leebeekstraat.

L’accès aux maisons sur la partie est de cette rue se fait par un nouveau chemin côté nord, lequel donne également accès au Maaltepark.  L’accès entre l’autoroute et le Maaltemeers se fait par deux chemins encadrant la passerelle. Tous ces chemins se faufilent entre les arbres existants et leur implantation préserve la plupart des fossés existants.

Les têtes de pont et les travées d’approche :

Les travées d’approche en terre-plein sont munies de garde-corps en tôle perforée raidie de 1 m de haut, à l’image de la passerelle elle-même. Du côté de la Oudespoorweg, le terre-plein est perméable à l’eau.

La mise en forme des entrées des passerelles, endroits ou se rencontrent le sol, la structure et le ciel,  est particulièrement soignée. De vastes collerettes prismatiques en acier “embrassent” les entrées des passerelles en un geste d’accueil.  De larges miroirs en tôle d’acier inoxydable poli y sont enchâssés.

Les couleurs, les matériaux et l'éclairage artificiel :

L’ensemble est entièrement réalisé en acier peint en blanc, à l’exclusion des miroirs d’entrée.

La couleur blanche est choisie, d’une part, parce qu’elle confère à l’ensemble une grande discrétion dans le paysage et que, d’autre part, elle procure à l’intérieur une ambiance lumineuse et feutrée, évitant éblouissement et contraste lumineux violent.

La couche antidérapante au sol est constituée d’un résine époxy de 1,5 à 2 mm d’épaisseur saupoudrée de grains de quartz, appliquée en atelier.

L’éclairage du pont est assuré par des réglettes à LED de 1 m de long, une par maille structurelle, disposées sur un des côtés du pont.

Crédits :

Architecture and Engineering:
Philippe SAMYN and PARTNERS All projects are designed by Philippe Samyn who also supervises every drawing

Structural Engineering:
Philippe SAMYN and PARTNERS with SETESCO (sister company 1986-2006) or INGENIEURSBUREAU MEIJER (sister company 2007-2015) if not mentioned

Services engineering:
Philippe SAMYN and PARTNERS
with FTI (sister company since 1989)
if not mentioned


01-575
TWO PEDESTRIAN BRIDGES, GHENT.
Client: CITY OF GENT.
Architecture: Partner in charge : J. Ceyssens.
Associates : L.  Barbarito, Th. Cooreman, F. Defrenne, R. Gijbels, D. Gundes, O. Jottard, C. Lizin, Th. Naessens, S. Tourbach, S. Van Der Meer.

1,995 m² ; 2010 (01/575).

Document E41_01/577-Fr Édition du
2011-07-18

Rendus
Dessins

For plans sections and elevations, please refer to the archives section of the site available from the “references” menu.

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