Page 190 - ELEMENTS EUROPA (FR)
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le patchwork monumental, les trois étages neufs ajustant les hauteurs
de l’un et de l’autre. Dans l’espace vide qui s’étire entre le dernier étage
d’Europa et le gril supérieur, la terrasse en forme de pergola qui illustrait
jadis la vocation festive et mondaine du bâtiment de Michel Polak est d’une
certaine manière recréée. Du moins subsiste la suggestion d’un plateau
ouvert sur le paysage bruxellois : le fait qu’y soient disposés les lanterneaux
éclairant le haut de l’atrium, les édicules techniques et la trame des poteaux
et contreventements soutenant la plateforme des panneaux solaires ne
devrait pas empêcher quelques privilégiés parmi les occupants d’Europa de
découvrir cette échappée visuelle vers la ville, ses toits et son panorama.
	 Les panneaux de cellules photovoltaïques réalisent en principe une
production d’énergie qui n’est pas censée s’élever à plus de 5 à 7 % de la
consommation prévue du nouvel édifice. Leur rôle dans le bilan énergétique
du bâtiment reste donc essentiellement théorique et en tout état de cause,
cette production est transférée au réseau général d’électricité sans pouvoir
être utilisée sur place. C’est dire à quel point le dispositif actuel est destiné
à rendre manifeste un équilibre écologique global, le bâtiment recevant ses
fournitures électriques du réseau à l’alimentation duquel il n’apporte qu’une
modeste contribution. En ce sens, la couverture photovoltaïque est une
sorte de témoin public de la transition en cours : l’autonomie énergétique
est suggérée, même si la consommation est très loin d’être équilibrée par
l’autoproduction.
	 La vertu environnementale ne se limite pas à ce signe extérieur de
captation et de transformation de l’énergie solaire. Elle concerne au
premier chef les dispositions prises pour la construction, et notamment
pour la réhabilitation du bâtiment historique classé du Résidence Palace.
Le principe de la réutilisation de matériaux anciens n’a pas trouvé pour
seule application la façade en patchwork de la rue de la Loi. Sur les façades
du Résidence Palace, tous les anciens châssis ont été déposés. Mais
contrairement aux portes et aux parquets de chêne qui ont été démontés
en vue de leur réemploi, les fenêtres n’ont pu être conservées sur place.
Les châssis d’origine n’avaient pas l’étanchéité requise. Ils ont été refaits
à l’identique mais avec double vitrage. Les mastics utilisés à l’époque de
la première construction s’étaient imprégnés dans la pierre qu’il a fallu
nettoyer. La question de la pression sur le cadre de fenêtre a été résolue
par le vissage des châssis dans la maçonnerie. Le savoir-faire requis est
coûteux, mais ce soin de menuisier évite le cache-misère des joints en
silicone. Philippe Samyn en fait une question d’architecture, de parfaite
continuité dimensionnelle et d’assemblage entre la trame des baies de pierre
et les fenêtres de bois qui y sont logées. La continuité des tracés jusqu’aux
éléments de parachèvement a valeur de principe : c’est elle qui nécessite les
plus hautes exigences en matière de dessin et de mise en œuvre, qui confère
au détail sa véritable signification architecturale. S’interdire la silicone, avertit
l’architecte, oblige à renouer avec la rigueur du détail.
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