Europa FR - page 141

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EUROPA
2013.04.17
La transparence reste relative : les salles sont tenues à l’abri des regards. Mais
les circulations, elles, sont visibles, spécialement les escaliers et les corridors
qui conduisent aux loges des interprètes. À nouveau, une habile ingénierie
s’applique à rendre possibles les ouvrages les plus minces : sur le pourtour,
les escaliers sont graciles, ne pèsent pas sur les planchers, leurs volées pendent
entre deux tôles d’acier perforé. L’escalier de secours au nez de la façade de la
lanterne peut jouer son rôle, il ne contrarie pas l’architecture. Un éclairage en
lumière blanche, placé au droit des montants intérieurs verticaux de la paroi
de l’atrium, sous forme de diodes électroluminescentes, fait luire la lanterne
de nuit comme de jour. On perçoit la masse de métal et de verre de cet étrange
objet ; on ne la subit pas.
Le ventre de la lanterne ? Figures pansues de Rabelais ou d’Alfred Jarry ? Ou
bien formes pulpeuses des sculptures de Niki de Saint Phalle, à qui Philippe
Samyn voue une fidèle admiration ? Plasticité merveilleuse ou inspiration sur-
réaliste ? L’élégante vêture de verre n’empêche pas de ressentir la touche de
grotesque qui frappe parfois les plus grandes œuvres de l’art : comme une rémi-
niscence des sphères purgatoires du Jardin des délices. Il y a un humour caché
dans cette triple couronne formée par l’enchâssement des salles où se tiendront
les chefs de la politique européenne. Il y a une drôlerie dans le mouvement as-
cendant de ces géométries calculées : troncs de cônes engendrant des courbes à
double foyer, plateaux rayonnants, parures à chevrons laiteux, trapèzes cintrés et
colonnes déhanchées. Les formes de la lanterne débordent littéralement. De
tensions assumées, d’audace consentie, de cérémonial respecté.
DES ELLIPSES DE VERRE
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